dimanche 31 mars 2013

Les Liens de sang et d'os

(Morrigun fut la nourrice des deux jumeaux de Nade... Une petite parenthèse pour relier les deux personnages.)


Et

La pointe de l’épée se posa sur la glotte de Cun Melun.

“Perdu, bach chuaer...”

Dievlig sentit le sang perler de son entaille, et ficha Kilhourz dans le sol. Cun Melun prit sa main et plaça un morceau d’étoffe sur la plaie pour en stopper le sang. 

“Ce n’est rien, petite soeur. Je suis désolé.”

Dievlig gifla son frère et le fixa droit dans les yeux.

“Tu as gagné! Ne rajoutes pas a ta victoire l’humiliation!”

La marque des doigts de Dievlig commença a apparaitre sur la joue de son frère. Mais le grand gaillard ne bougeait pas et veillait a ce que l'effusion sanguine stoppe. Dievlig s’en voulait d’avoir réagit si promptement.

“Je ... Je... Suis désolée de t’avoir giflé..”

“Ne rajoute pas à la leçon méritée, des regrets inutiles...”

Cun Melun esquissa un sourire et Dievlig plaça sa main sur la marque écarlate de Cyrion. Ses mains étaient fraiches et douces comme la soie. 

“Quelle hérésie qu’aucun homme ne puisse sentir sur sa joue tes caresses.”

“Une prêtresse n’a pas d’homme et ne connais pas l’homme... 
Les Hommes sont collectivement mauvais... Je suis bien mieux ici, a veiller que de servir un de ceux-la.”

“Crois tu que Mam serait fier de nous, si elle nous voyait?”

“Cun Melun!? Une mère est toujours fière de ses enfants... Peu importe ce qu’ils deviennent”

“Pour toi, c’est sur. Ta voie lui aurait surement plu. Mais moi, un guerrier et maintenant que la guerre est finie je suis comme un fourreau inutile au coeur de la mêlée”

“Tu es mon frère, et un de ceux qui font le lien entre deux peuples qui autrefois se haïssaient. N’est ce pas suffisant?”

“Si sans doute... Mais tu n’y crois pas, me trompe je?”

Dievlig posa ses doigts sur la bouche de son frère en guise de bâillon. Cun Melun se posait bien trop de questions inutiles.

“Le sang ne perle plus. Te voilà guérisseur.”

Dievlig se mit a rire en espérant entrainer son frère avec elle. Cun Melun la regarda puis contemplant ses larges mains éclata de rire.

“Ie, avec des mains pareilles je pourrai faire des amputations sans outils!”

Ils se posèrent tous les deux un instant dans la clairière, Dievlig se réfugia dans les bras de son frère et contempla le ballet du printemps.

“Tu as un cheval, bach chuaer?”

“Na. Tu me prendras en croupe?”

“Ie, le mien est bien assez solide pour un écureuil comme toi.”

“Alors nous partirons demain... Profites maur braud de ce temps ici, un jour tout ceci aura disparu”

“Que tu es pessimiste, bach chuaer.”

“Na, réaliste. Tu auras bientôt une épouse, braud?”

“Na, pourquoi?”

“Simple curiosité féminine...”

“Serais tu jalouse?”

Pour simple réponse Dievlig se réfugia un peu plus profondément dans les bras puissant de son frère et s’assoupi. Quand elle se réveilla, son frère la tenait toujours dans les bras. Il n’avait pas bougé d’un poil et regardait la plaie de sa soeur se fermer lentement.

“Ce lieu a toujours autant de magie, Dievlig?”

“Non, plus comme avant... Si tu regarde bien tu verras la différence entre la nature sauvage et celle de MamDaear. Son emprise diminue petit a petit.”

“Alors pourquoi restes tu ici, bach chuaer? Ca ne sert plus a rien si son pouvoir diminue?”

“Il en reste encore un peu, et je suis bien ici... Loin de tout, de l’agitation, du superficiel et du perpétuel recommencement.”

Cun Melun passa ses mains sur les épaules de sa soeur en signe d’affection et libérant sa soeur commença a s’occuper de sa monture.

“Tu as tant de chose a apporter aux autres, Dievlig. Tant a vivre, aimer, découvrir... Je ne comprends pas comment on peut se couper a ce point des autres.”

“Si tu te souviens bien, cela a toujours été le cas.”

Dievlig escalada une partie de l’arbre et s’allongea dans l’une des nombreuses fourches que lui offrait la ramure. 

“Tu dormiras en bas, Cun Melun: la mousse est bien plus confortable pour un être civilisé comme toi”

Dievlig éclata de rire et se lova sur elle même comme un félin avant de s’endormir.

Le grand blond vêtu de jaune termina les préparatifs du départ et s’allongea contre le tronc du grand arbre. De sa couche sommaire, sous sa couverture de laine, il pouvait apercevoir la cascade de cheveux roux de sa soeur danser dans la brise nocturne. Puis ses paupières se fermèrent et il profita d’un sommeil sans rêves.

Le soleil s’était levé péniblement ce matin là. Dievlig s’affairait sous la pluie, ses pieds nus récoltaient à chaque pas un peu de boue qui giclait entre ses orteils. Ses longs cheveux ruisselaient sur une grande robe verte qui l’habillait avec la classe d’un sac à patate. Elle avait ceint l’épée de sa mère et rassemblait quelques affaires et fruits pour le voyage. La pluie martelait les feuilles encore frêles des arbres comme la peau d’un tambour. Pour Dievlig ce tintamarre était le signe du départ. Pour elle, la pluie était un fanal, MamDaear effaçait la trace de son passage dans la Clairière. Elle ressentait en elle comme la venue d’une ère nouvelle, pourtant elle ne prêtait pas encore attention aux intersignes.

“Cun Melun, debout fainéant!”

Son frère émergeait de son sommeil de plomb tel un ours qui sort d’hibernation. Les sourcils froncés, il jeta un regard a l’excitée qui tenait la bride de son cheval en attendant qu’il veuille bien seller la bête. Il avait gardé pour la nuit sa cote de cuir. Il ajusta ses pièces d’armure avec rapidité et vida le contenu d’une outre d’un geste rapide. Un quignon de pain de route en bouche il sangla son cheval et se mit en position pour faire monter sa soeur sur le dos de l’étalon.

“Ou sont tes affaires, chuaer?”

Cyrion balançait son regard de droite a gauche. Dievlig lui exhiba un balluchon de toile guère plus gros qu’une gibecière et le glissa sur son dos. Le molosse blond tiqua et Dievlig posa son pieds boueux sur les gants de son frère.

“Fait moi grimper... Ecuyer”

Rhud Wiwer éclata de rire et s’installa en amazone sur la croupe large du destrier. Cun Melun fit gicler la boue sur le sol et sauta en selle comme Josh Randall. 

“En route bach chuaer pour Durgors! Maur chuaer sera ravie de se débarrasser de tous les vieux manuscrits de Mam.”

Cun Melun piqua la monture et ils partirent au petit trot vers le sud.

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